Il naît à Damas. Après une enfance au Liban, il accomplit à Paris des études d'abord en médecine, puis en sociologie; psychologie et ethnologie. Il a ainsi été l'élève de Claude Lévi-Strauss, Roger Bastide, Jacques Lacan, Pierre Bourdieu et André Leroi-Gourhan. À la fin des années soixante, il soutient une thèse de doctorat de troisième cycle sur Le Folklore obscène des enfants sous la direction de Roger Bastide : Jacques Lacan et Georges-Henri Rivière sont dans le jury. Son doctorat d'État - de 3000 pages -, soutenu en 1984, est consacré à l'étude de l'ésotérisme - spirituel et charnel - de Rabelais. Jacques Le Goff et Jean Céard font partie du jury (thèse publiée chez Maisonneuve et Larose avec pour titre A Plus Hault Sens).
Il a également été chargé de cours dans diverses universités parisiennes (Paris-I, -III, -VII, -VIII, -X) et à Strasbourg, avant d'être nommé Professeur des universités à l'université de Nice Sophia-Antipolis, à partir de 1984.
Spécialiste de François Rabelais et grand connaisseur aussi bien des traditions populaires que des sources scripturaires de l’Antiquité — comme l’était du reste Rabelais lui-même —, Claude Gaignebet a proposé de l’œuvre du plus grand écrivain du XVIe siècle une lecture « à plus hault sens », notamment grâce aux clefs folkloriques et calendaires qu’il a su y reconnaître : sous le masque de la facétie, Rabelais a caché dans ses livres tout un savoir ésotérique empruntant aussi bien à l’héritage pythagoricien qu’à la kabbale, et trouvant échos et prolongements dans la culture populaire, particulièrement dans les conceptions touchant à l’impureté, qu’il s’agisse de la lèpre, des menstrues ou des excréments.
S'inspirant de la méthode calendaire du folkloriste Pierre Saintyves, proche de l’École de Mythologie française, qui utilise déjà conjointement des données folkloriques, mythologiques, héortologiques, hagiographiques, C. Gaignebet estime que les contes populaires restent, « sous les légers vêtements qu’imposent leur forme (...) les deux grands réservoirs d’une mythographie » (Gaignebet 1976: 305). Il renouvelle ainsi l’approche d’un Henri Dontenville. Sa principale innovation par rapport à ce dernier est l’accent mis sur le calendrier, marqué par les grands rythmes annuels et des insertions de périodes « hors temps » au cours desquelles le temps peut être conçu comme allant « à rebours » — tels les douze Jours ou le cycle de Carnaval.
Si Dontenville avait examiné certaines vies de saints pour les relier au matériel mythologique qu’il étudiait, Gaignebet examine systématiquement leur position dans le calendrier, démontrant qu’il y a là une clef de lecture capitale pour comprendre un grand nombre des éléments « énigmatiques » infusant les œuvres de Rabelais ou Brueghel, pour ne citer que ces deux exemples. Le thème de la circulation des âmes au moment particulier du renversement du temps, lui permet de rendre ainsi compte d’une large partie de la thématique carnavalesque et des mythes associés. S’étant par ailleurs initié personnellement à de nombreuses pratiques traditionnelles de métiers, Claude Gaignebet est à même de déceler la symbolique technique résidant à l'arrière-plan de nombreuses légendes.
Enfin, C. Gaignebet a su comprendre l'importance des étymologies populaires et des jeux de mots qui, souligne-t-il, sont bien plus créateurs de mythologie que les étymologies savantes, obscurcies aux oreilles des locuteurs par l’évolution phonétique.
Bibliographie
Le carnaval : essais de mythologie populaire, Payot, 1974
Claude Gaignebet, « Les saints successeurs des dieux à la Renaissance », dans Jean Poirier (dir.), L’Autre et l’Ailleurs, hommage à R. Bastide, Paris, Berger-Levrault, , p. 305 :
Le folklore obscène des enfants, G.-P. Maisonneuve et Larose, 1980
À plus hault sens: l'ésotérisme spirituel et charnel de Rabelais, Maisonneuve et Larose, 1986 (ISBN270680923X et 9782706809231)
Art profane et religion populaire au Moyen Âge, avec Jean-Dominique Lajoux, 1985, PUF.
Enregistré in situ pour le solstice d'été en Pays basque, [4]
Lire en ligne
Un entretien entre Claude Gaignebet et La Mètis (Maryline Desbiolles, Jean-Louis Cantin et Philippe De Georges) publié primitivement dans la revue La Mètis, (no 9 « Les Noces », automne 1992), [5]
Un hommage de la Revue des arts de la parole suivi d'un entretien engagé de Claude Gaignebet sur l'importance des histoires et des jeux chez l'enfant [6]
Claude Gaignebet dans l'émission de télévision Apostrophes du , sur le thème "Les gros mots" (archive INA).