Le comté de Blois est une ancienne principauté féodale du centre de la France, créée à partir du pagus de Blois qui était une entité administrative gallo-romaine. Ses comtes furent parmi les plus puissants du royaume entre les XIe et XIIIe siècles, après être parvenu à encercler le domaine royal des Capétiens en dominant également la Champagne.
De sa création jusqu’en 1547, le comté a été dirigé sans discontinu par des comtes, accumulant parfois plusieurs titres plus ou moins importants, ou parfois déléguant leur travail à des vicomtes. Le comté exista jusqu’à son rattachement définitif aux terres du royaume en 1660, à la mort du duc Gaston d’Orléans, dernier comte de Blois en titre.
L'invasion des Romains vers -52 avant J.-C. signifie le début de l'administration et des enregistrements écrits, bien que rares, en opposition avec la tradition orale des Gaulois.
En l’an 410, le chef breton Ivomadus aurait conquis les pagi de Blois et de Chartres[6] en battant le consul en place, un certain Odo, probablement d’origine germanique. Il aurait ensuite instauré un état indépendant, le royaume de Blois[9], au sein même de l’Empire, sous un Flavius Honorius déjà affaibli par les raids barbares à répétitions. Cette entité mal connue des historiens sembla rester indépendante près d’un siècle, en résistant à l’invasion du royaume wisigoth de Toulouse, mais fut finalement conquise par le roi francClovis, entre 481 et 491[10], ou en 497[11].
Un premier comté franc
Les Francs ont ensuite établi un premier comté du nom de Comitatui blesensi[12], dont la capitale se tenait déjà à Blois, sur la rive droite de la Loire[5]. Les comtes de cette époque ne sont pas connus, et la plus ancienne trace écrite relative aux Blésois remonte à 584 par Grégoire de Tours[13].
En 592, les contrées voisines sont transférées à son frère Caribert Ier, sacré roi de Paris (dont le territoire inclut toujours Chartres et Tours)[8].
Au niveau religieux, le diocèse de Blois dépend toujours de l’évêché de Chartres. Cette décision aurait été prise par les premiers rois francs afin de tenir le clergé de Chartres éloigné de la politique et de la gestion du domaine.
Durant cette période, Blois est régie par l’un des 7 maires du palais du royaume dont la mission fut de sélectionner un noble franc pour l’élever comte[17]. Le nom du comte choisi ne nous est pas parvenu.
Lors des luttes de pouvoir entre les fils de l’Empereur Louis Ier, Guillaume, dit le Connétable, prend le parti de Pépin Ierd’Aquitaine, contre son demi-frère Charles II, le Chauve, et y perd la vie[21].
Waldrade, sa sœur et dernier enfant du Comte Adrien, récupère par héritage les comtés ayant appartenu à ses frères Eudes et Guillaume et en aurait transmis le contrôle à son époux Robert III de Hesbaye.
Waldrade transmet les droits des comtés de Blois mais aussi d’Orléans, d’Anjou, d’Auxerre et de Nevers, à son supposé fils, Robert le Fort[22].
Entre-temps, la contrée est pillée et incendiée à plusieurs reprises par le chef vikingHasting : en 845[13], en 851[23], en 854, et entre 856 et 857[24],[25]. Il repassa en 882 en Blésois et dans le Chartrain et serait devenu un fidèle de Louis III[26]. Un nouveau comté est né au nord de Blois : celui de Chartres[27].
Les raids normands apportent également des religieux en quête de protéger les reliques sacrées qui leur ont été confiées. C'est ainsi que Blois devient l'asile des reliques de Saint-Calais et de Saint-Lomer, recueillies au sein de la chapelle Saint-Calais du château et de l'abbaye Saint-Laumer[8].
Avant l’an 900, Robert Ier, comte de Blois, délègue l'administration du Blésois à des vicomtes. Le premier vicomte connu est Garnegaud[28] (dès 886 et avant 920) qui ne laissera pas d'héritier. A la mort de Robert en 923, son fils Hugues le Grand lui succède dans ses honneurs. Le nouveau vicomte de Blois[8] est Thibaud l'Ancien, déjà vicomte à Tours pour les Robertiens. En 940 au plus tôt, Thibaud Ier, dit le Tricheur[29] succède à son père Thibaud l’Ancien. Hugues le Grand, devenu entre temps marquis de Neustrie[30], a élevé Thibaud au rang de comte, cette honneur inclut Blois, Chartres et Châteaudun.
Au même titre que son père, Thibaud le Tricheur était politiquement proche des Robertiens et par conséquent, d’Hugues le Grand. Son alliance et sa fidélité restèrent solides avec les Robertiens jusqu’à la mort du duc des Francs en 956. L’héritier désigné d’Hugues le Grand était son fils, Hugues Capet, mais Thibaud s'est montré de plus en plus indépendant,Hugues n’avait que 15 ans, notamment lors de la guerre entre le thibaldien et le normand Richard Ier entre 959 et 963. Ainsi, Thibaud proclama son indépendance vis-à-vis de son jeune suzerain en s’intitulant « comte de Blois et de Tours », gagnant ainsi son épithète[31].
En 958, lors d’une rencontre avec son beau-frère Foulques II d’Anjou, alors nouvel allié depuis la mort du dernier roi de Bretagne, les deux hommes vont jusqu’à se présenter comme « gouverneurs et administrateurs du royaume de Neustrie » et « comtes par la grâce de Dieu », et non par celle d’un quelconque suzerain.
À partir de 960, Thibaud s’associe de façon plus forte au carolingienLothaire II, et affirme son influence en étendant son territoire jusqu’à Bourges, Chartres et Tours. Toutefois, il ne rompt pas avec Hugues et continue à fréquenter les deux cours, ducales et royales[31]. Après sa mort et celle du malheureux Thibaud II en 1004, son fils Eudes Ier formalise la délégation de certaines taches en nommant son troisième fils, Robert, vicomte.
En 1171, Blois est une des premières villes d’Europe à accuser ses juifs de crimes rituels à la suite de la disparition inexpliquée d’un enfant chrétien. Sur ordre du comte Thibaut V, 30 à 35 juifs (sur une communauté d’environ 130 personnes) sont brûlés vifs le près des fourches patibulaires[24].
En 1328, le comte Guy Ier cède le droit de frapper monnaie sur ses terres en faveur de son beau-frère, le roi Philippe VI, en échange de 15 000 livres tournois[41],[42]. La livre blésoise, jusqu'alors unique monnaie en vigueur à l'échelle du comté, disparaît.
La cession du comté au second fils du roi Charles V par le comte Guy II entraîna de fait le rattachement de Blois au duché d’Orléans en 1397, bien que les ducs accumulent encore le titre de comte. En effet, Orléans n’étant pas pourvue de château, celui de Blois devint la résidence officielle des ducs, même si ces-derniers siégeaient dans les faits au sein de la cour du roi, alors établie au château du Louvre, à Paris.
Malgré sa proximité avec le front atlantique, le comté se trouve en cœur du théâtre de la guerre de Cent Ans, qui oppose les Plantagenêt au roi de France. Par exemple, le duc Charles Ier d’Orléans, capturé après la bataille d’Azincourt en 1415, n’est libéré qu’en 1444[13]. Son intérim est assuré par son frère batard, Jean, alors seigneur de Romorantin et de Millançay, qui protégea Blois alors que la ville était encerclée par des Anglais. Il devient compagnon d'armes de Jeanne d’Arc, qui séjourne elle-même à Blois pour se ravitailler et ainsi libérer Orléans, alors occupée par les Anglais, fin avril 1429[Note 1],[44]. À son retour, le duc Charles s'est efforcé à réunir à Blois de nombreux artistes, rejetés dans leur ensemble de la cour de Louis XI.
Bien que transmise en apanage au sein de la maison des Valois, les comtés de Blois et d’Orléans n’entrèrent formellement au sein du domaine de la Couronne qu’en 1498 sous le nouveau roi Louis XII, qui établira naturellement sa cour à Blois cette année-là. En étant duc d’Orléans (sous le nom de Louis II) de 1465 à son couronnement, Louis XII conserva son titre de comte de Blois[45],[46].
Nouveau fief de la Renaissance française
À partir de 1498 et du couronnement de Louis XII, le comté est progressivement rattaché au domaine royal avec le duché d’Orléans, traditionnellement offert à l’héritier au trône. Néanmoins, faute de fils avec la reine Anne de Bretagne, le roi continue de jouir de l’usufruit du comté après 1498[13]. D’ailleurs, en installant sa cour à Blois, Louis XII invite non seulement les nobles du Royaume sur les bords de Loire mais fait également du Blésois le berceau de la Renaissance française. Le comté s’enrichit considérablement, attire de nombreuses figures de l’étranger (dont Léonard de Vinci, Catherine de Médicis), et un nouveau château se dessine à Blois afin d’assoir une importance diplomatique grandissante. Les traités de Blois y furent signés en 1504, avec pour but de stopper les guerres d’Italie en prévoyant un mariage entre la fille aînée de Louis XII, la princesse Claude, avec le duc de Luxembourg, qui n’est nul autre que le futur Charles Quint. Cependant, Louis XII accorda finalement la main de sa fille au jeune François de Valois-Angoulême, au grand damn de la reine Anne de Bretagne[13]. À la mort de cette-dernière en 1514, Louis XII confie le comté de Blois à leur fille Claude, étant plus intéressée à la religion qu’envers la politique, au lieu du duché de Bretagne. Le roi blésois décède l’année suivante et, dès 1516, le nouveau François Ier ordonne la conception d’une ville idéale, une « nouvelle Rome » –Romorantin–, mais le projet fut avorté après le décès de Léonard de Vinci en 1519[47]. Débute en contrepartie la construction d’un immense château annexe dédié à la chasse dans la forêt de Boulogne, au cœur de la Sologne, près du château de Montfrault érigé sous les comtes au Xe siècle[48],[49]. Celle-ci dura près de 25 ans, soit presque tout le règne François Ier, jusqu’en 1544. Plus tard, c’est un autre souverain qui prendra le même type de décision en convertissant un pavillon de chasse en somptueux palais : Louis XIV. Néanmoins, si le Roi-Soleil souhaitait de son temps quitter la capitale, François Ier quitta le Blésois peu après la mort de sa femme, la reine Claude, en 1524, pour installer sa cour plus près de Paris, à Fontainebleau. Il est important de noter que François Ier n’a pas été doté du titre de comte de la part de sa veuve, c’est leur second fils, le duc Henri de Valois, qui en hérita l’usufruit. Lors de son couronnement sous le nom de Henri II en 1547, il finira par intégrer le Blésois au domaine royal[13].
Rattachement au domaine royal
Bien que son père eut déjà rassemblé l’essentiel des appartements royaux en région parisienne, Henri II et son épouse Catherine de Médicis passent chaque année plusieurs mois à Blois, essentiellement en hiver[13].
En 1626, le duc Gaston d’Anjou, troisième fils du roi Henri IV, épouse non sans regret la richissime duchesse de Montpensier, Marie de Bourbon[Note 2], que lui impose Richelieu. Il reçoit ainsi en apanage les duchés d’Orléans et de Chartres, ainsi que Blois de nouveau élevé en comté indépendant. Son règne fut marqué par sa motivation à rénover de multiples châteaux de la Sologne. Après la Fronde, Gaston d’Orléans, comme on l’appela désormais, est assigné à celui de Blois à partir de 1652 et s’éteint en 1660 dans sa nouvelle résidence en Vienne. Comme le veut la tradition apanagiste, ses titres sont transférés à Philippe d’Orléans, frère cadet de Louis XIV, mais ce-dernier décide de ne pas lui octroyer Blois. Le comté fut donc rattaché une nouvelle et ultime fois au domaine royal.
Depuis cette époque, le Blésois ne dépend donc plus directement du duché d’Orléans, mais reste administrativement rattaché à la province orléanaise.
Les frontières ainsi que les entités voisines du comté ont beaucoup varié au cours du temps, mais les comtes de Blois sont parvenus à conserver pendant une longue période les comtés de Châteaudun et de Chartres, ainsi que les seigneuries de Beaugency et de Sancerre[51].
De la création d’une vicomté en 909 à 1044, le territoire de Blois fut joint au comté de Tours, et à celui de la Champagne à deux reprises : de 1023 à 1037, puis de 1063 à 1152. Il était alors commun de parler de comté de Blois-Champagne ou d’ensemble bléso-champenois[4],[52].
Le comté historique de Blois fut durablement un voisin direct[4],[51] :
le château de Blois, reconstruit par tranches par les rois au XVIe siècle. Du temps des comtes, y subsistent la Tour du Foix et la Salle des États Généraux,
Note : Tous les châteaux mentionnés ci-dessus sont ouverts au public d'une quelconque manière, à l'exception des châteaux de Bury, de Montfrault, d'Onzain et de la Vicomté.
Établissements religieux
Outre les très nombreuses églises et paroisses créés ou rénovées au Moyen Âge, les comtes sont à l'origine de plusieurs établissements religieux, comme :
↑Pierre Papin, « Découverte d’un rempart antérieur à la tour maîtresse du château de Loches (Indre-et-Loire) : la question du système défensif originel », Revue archéologique du Centre de la France, no Tome 61, (ISSN0220-6617, lire en ligne, consulté le )
↑Chronique de Raoul Glaber, chapitre III de Conan duc des Bretons et de Foulques comte des Angevins.
↑Guy Devailly, Le Berry du Xe siècle au milieu du XIIIe : Étude politique, religieuse, sociale, et économique, , 636 p. (ISBN978-3-111-63106-6, lire en ligne), p. 166
↑Louis de La Saussaye, Blois et ses environs : guide artistique et historique dans le Blésois et le nord de la Touraine, Chez tous les libraires, (lire en ligne), p. 92–95.
↑Simon Bryant, Jean-Sylvain Caillou, Dominic Hofbauer et Patrick Ponsot, « Le château de Chambord (Loir-et-Cher) – Un monument trop (peu) regardé », Medieval Europe, 4e congrès international d'archéologie médiévale et moderne, (lire en ligne)
↑Jean-Yves Denis et al., Le Collège : Le Lycée Augustin-Thierry : Grande et petite histoire, Blois, Association des anciens élèves du collège et du lycée Augustin-Thierry, , 110 p.
↑ a et bGeorges Tessier, « Les archives de la Chambre des comptes de Blois à la fin du XVIIIe siècle (1775-1781) », Bibliothèque de l'École des chartes, , pp. 354-377 (lire en ligne)
↑Michel Bur, « L'édition des chartes d'Henri le Libéral, comte de Champagne (1152-1181) », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, (lire en ligne)
↑René Cintré, Les marches de Bretagne au Moyen-Âge - Économie, Guerre et Société en Pays de Frontière, FeniXX, , 238 p. (EAN9782402067539)
↑Georges Touchard-Lafosse, La Loire historique, pittoresque et biographique, d'après les auteurs de l'Antiquité et les légendes, chroniques, chartes, histoires provinciales, statistiques, travaux administratifs, traditions locales, monuments historiques, documents divers, recueillis en 1839 et 1840 dans les villes, bourgs, châteaux, archives, bibliothèques, sociétés savantes et cabinets particuliers : De la source de ce fleuve à son embouchure: Loire historique, seconde région, Suireau, (lire en ligne), Sections 5 et 6, chap. VII (« Loir-et-Cher »), p. 756
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Michel-Jean-François Ozeray, Histoire générale, civile et religieuse de la cité des Carnutes et du pays Chartrain, vulgairement appelé la Beauce, depuis la première migration des Gaulois jusqu'à l'année de Jésus-Christ 1697, époque de la dernière scission de notre territoire par l'établissement du diocèse de Blois, vol. 2, Munich, Garnier & Fils, , 408 p. (ISBN978-1-271-14435-8, lire en ligne [PDF]).