Il débute à Fontainebleau en 1742, devant la cour de Louis XV, puis le prince Henri de Prusse l'invite à Berlin. De retour à Paris, il entre dans la troupe de ballet de l'Opéra-Comique. Il épouse en 1748 l'actrice et danseuse Marguerite-Louise Sauveur. À la fermeture de l'Opéra-Comique en 1748, Noverre se rend à Strasbourg et à Lyon, où il danse jusqu'en 1752. Il passe ensuite deux années à Londres avec l'acteur britanniqueDavid Garrick. En 1754, il revient à l'Opéra-Comique et y compose son premier ballet, Les Fêtes chinoises[2].
De retour à Lyon entre les années 1758 et 1760, il y produit plusieurs ballets et publie ses Lettres sur la danse, qui connaîtront plusieurs éditions et des traductions en anglais, en allemand et en espagnol. Appelé à Stuttgart en 1760, il y reste sept ans et fonde ce qui deviendra le Ballet de Stuttgart, puis se rend à Vienne en 1767, sous la protection de Marie-Thérèse d'Autriche, qui le nomme maître des ballets de la cour. Il compose de nombreux ballets, dont certains en étroite collaboration avec Gluck. En 1775, devenue reine de France, Marie-Antoinette le fait venir à Paris et le fait nommer maître des ballets de l'Opéra. Après un second séjour à Londres, de 1785 à 1793, Noverre se retire à Saint-Germain-en-Laye vers 1795 et y meurt en 1810, alors qu'il prépare l'édition d'un Dictionnaire de la danse.
Outre les Lettres sur la danse, on lui doit des Observations sur la construction d'une nouvelle salle de l'Opéra (1781), Deux lettres de M. Noverre à Voltaire (sur Garrick, 1801), des Lettres à un artiste sur les fêtes publiques (1801), ainsi qu'un manuscrit non daté, rédigé vers 1752, intitulé Théorie et pratique de la danse en général, de la composition des ballets, de la musique, du costume, et des décorations qui leur sont propres (Paris, Bibl. de l'Opéra, copié par le calligraphe Pierre-Jean-Paul Berny de Nogent).
Il semble bien que ce soit à sa fille, Louise Victoire Jenamy, pianiste, qu'en 1777, Mozart dédia son Concerto pour piano no 9 en mi bémol majeur, dit « Concerto Jeunehomme »[4].
Le théoricien
Poursuivant les réformes esquissées par Louis de Cahusac, le librettiste de Rameau, Noverre estime que le ballet doit peindre une action dramatique « sans s'égarer dans les divertissements », dépeindre les passions, les mœurs et les usages de tous les peuples. Le compositeur de ballet doit suivre la nature et la vérité, il doit offrir une narration logique fondée, comme le récit dramatique, sur la succession « exposition - nœud - dénouement ». La danse doit être naturelle et expressive plus que technique et virtuose. La danse « en action » doit émouvoir le spectateur par une pantomime expressive, inspirée du jeu théâtral, tel que celui de Garrick.
Noverre ne ménage pas ses critiques à l'égard de la danse de son temps, et plus particulièrement sur la situation de l'Opéra de Paris : il remet en cause l'organisation hiérarchique du ballet, il proscrit le masque qui, dit-il, « étouffe les affections de l'âme », il poursuit la réforme des costumes précédemment introduite à l’Opéra par Marie Sallé et prône des costumes véridiques, allégés et mieux adaptés à la danse. Dans la collaboration de Noverre avec le dessinateur Louis-René Boquet à Stuttgart, la recherche de l'élégance cède la place à celle de la « vérité historique » et le symbolisme et le formalisme caractérisant les costumes de ballet jusqu'à cette époque évoluent vers l'expression des émotions et de la réalité (bien que stylisée) du personnage[5].
Quant au danseur, selon Noverre, il doit posséder une culture générale large, incluant l'étude de la poésie, de l'histoire, de la peinture, de la géométrie, de la musique et de l'anatomie.
Ainsi, les nouvelles propositions qu'il émet formeront le terreau du ballet romantique. Il contribue à l'art de la Pantomime, « La danse doit être plus naturelle, plus expressive ».
Il décrit aussi la « danse en action », le ballet doit peindre une action dramatique, basée sur une représentation de la société (mœurs, passion).
Dans La Maison du chat-qui-pelote de Balzac, Monsieur Guillaume, marchand drapier, juge sévèrement cet artiste et tous les artistes en général, mettant ainsi dans le même sac peinture, danse, art dramatique :
« Ils sont trop dépensiers pour ne pas être toujours de mauvais sujets. J'ai fourni feu M. Joseph Vernet, feu M. Lekain, et M. Noverre. Ah ! Si tu savais combien de tours ils ont joué à ce pauvre monsieur Chevrel ! Ce sont de drôles de corps[6]. »
1795 : The Marriage of Peleus and Thetis (Londres)
Bibliographie
L'Académie royale de musique au XVIIIe siècle, Émile Campardon, 1884, t. II, p. 202
Les Spectacles de la foire, Émile Campardon, 1877, t. II, p. 182-183
Éloge de M. Noverre, Mercure de France, , p. 134-135
Arianna Beatrice Fabbricatore, La Querelle des pantomimes. Danse, culture et société dans l’Europe des Lumières, Presses universitaires de Rennes, 2017 (ISBN978-2-7535-5206-7)
↑(de) Michael Lorenz, « Mademoiselle Jeunehomme ». Zur Lösung eines Mozart-Rätsels (Vers une solution d'une énigme de Mozart), essai pour l'exposition Mozart de 2006. Da Ponte Institut, Vienne, 2006, p. 423–429.
↑Le langage de la danse classique, guide aux sources iconographiques, Flavia Pappacena, Gremese, 2012.