En 1878, visitant l'Exposition universelle de Paris, Redon fut frappé par le Phaéton de Gustave Moreau, une grande aquarelle préparatoire pour la décoration d'un plafond, séduit par la luminosité éblouissante, les lignes divergentes, la force des couleurs. Vers la fin de sa vie, entre 1904 et 1914, il se confronta au sujet mythologique du char du soleil d'Apollon en créant différentes versions dans lesquelles l'écho de l'œuvre de Gustave Moreau se manifeste vivement.
L'inspiration pour la pose des chevaux peut également se retrouver dans le dessin de Michel-Ange, la Chute de Phaéton, mais Redon en a transformé le rythme dans une direction ascendante[1].
Le Char d'Apollon est aussi un hommage à Eugène Delacroix, peintre qu'il admirait. À propos de l'Apollon terrassant le serpent Python, au centre du plafond de la galerie d'Apollon au musée du Louvre, dont il exécute une copie vers 1872[2], il écrivait :
« C'est le triomphe de la lumière sur les ténèbres. C'est la joie de la pleine luminosité en opposition à la tristesse de la nuit et des ombres, comme la joie de se sentir bien après l’angoisse. »
Le char d'Apollon vainqueur du serpent Python devient une célébration métaphorique du triomphe du bien sur le mal[3] : de la dimension apollinienne sur la désintégration dionysiaque, du passage des ténèbres de l'âme à l'expérience du salut, du désespoir de la mort à la luminosité de la vie[4].
Redon a su tirer son originalité de ce qu'il définissait lui-même comme les trois sources de l'art : la tradition, la réalité et l'invention personnelle.