Reconstruction en 3D d'un cerveau où l'on peut voir les deux électrodes implantés qui ciblent les structures profondes du cerveau, mises ici en couleurs.SCP
Historique
La stimulation cérébrale profonde a été mise au point grâce à une collaboration du neurochirurgien Alim-Louis Benabid et du neurologue Pierre Pollak au CHU de Grenoble, dans les années 1980-1990[1].
Mode d'action
Les mécanismes exacts par lesquels la stimulation cérébrale profonde agit restent mal compris. L'hypothèse dominante est que l'application du courant électrique alternatif produit par le stimulateur va modifier l'activité neurophysiologique dans les régions ciblées, mais éventuellement aussi à distance via les nombreux faisceaux de fibres qui connectent les différentes parties du cerveau.
La stimulation électrique peut tout aussi bien activer qu'inhiber l'activité des neurones[2]. Elle favorise le relargage de glutamate et d'adénosine par les astrocytes[3], ce qui a pour conséquence d'abolir l'activité spontanément oscillante du thalamus[4].
Indications
Maladie de Parkinson
On peut proposer la mise en place de stimulation cérébrale profonde quand ces éléments sont réunis[5] :
bonne réponse aux traitements par dopamine ;
présence de fluctuations on-off ;
dyskinésie sévère diminuant la qualité de vie ;
tremblement résistant aux médicaments ;
et fonctions cognitives relativement conservées.
La stimulation cérébrale profonde améliore aussi bien les symptômes que la qualité de vie des patients résistants au traitement habituel[5]. L'efficacité semble être prolongée, avec un recul de plus de 10 ans pour certains patients[6]. En cas d'échec, un repositionnement de l'électrode, voire son changement ou une modification de sa cible anatomique peuvent être proposés[7].
La cible peut être le noyau sous-thalamique ou le globus pallidus, les deux sites étant équivalents du point de vue de l'efficacité[8]. Elle peut être unilatérale ou bilatérale en cas de résultats insuffisants[9].
Troubles psychiatriques
Les autres indications sont essentiellement en cours d'évaluation.
Les approches les plus récentes de la recherche sur les applications de la stimulation cérébrale profonde en psychiatrie se concentrent sur l'approche connectomique, soit l'identification de réseaux de fibres plutôt que de cibles focalisées[22],[23], et l'identification de biomarqueurs psychiatriques pour une stimulation adaptative[23].
Réalisation
Une imagerie cérébrale par scanner ou par IRM est faite afin de visualiser la cible de la stimulation. Des repères sont mis en place sur la peau du crâne pour le repérage tridimensionnel. Le trajet de l'implantation est alors fixé, en tenant compte de la position des vaisseaux sanguins afin de les éviter.
La procédure est faite idéalement chez un patient éveillé et ayant arrêté ses traitements neurologiques afin d'évaluer précisément le retentissement de la mise en place des électrodes. Ces dernières sont introduites, après anesthésie locale, à travers une petite ouverture effectuée dans le crâne et sont positionnées dans la cible soit à l'aide d'une reconstruction tridimensionnelle du cerveau du patient, soit sous contrôle direct d'une IRM[5]. Les électrodes sont alors fixées au crâne et sont tunnelisées sous la peau jusqu'au lieu d'implantation du boîtier (zone sous-claviculaire). Ce dernier est mis en place sous la peau et connecté aux électrodes.
L'implantation d'électrodes pour des procédures fonctionnelles (stimulation cérébrale profonde, stimulation du cortex cérébral) est un exemple où l'aide d'un robot peut être appréciable.
Incidents et accidents, effets secondaires
Comme pour toute implantation de matériel, les deux principales complications sont l'infection et l'hémorragie.
Le taux d'infection peut atteindre 5 %, restant en règle générale extra cérébrale mais imposant le retrait du matériel[24]. Le risque hémorragique est comparable, souvent sans conséquence, mais peut conduire plus rarement, à un déficit neurologique irréversible ou au décès[25].
Le système est mis en route quelques semaines après l'implantation afin d'attendre la réabsorption d'un éventuel œdème cérébral local[5].
Le réglage joue sur la fréquence de stimulation (130 à 185Hz) la largeur des impulsions (60 à 120μs) et l'amplitude de ces dernières (2,0 à 5,0V) et doit être adapté pour chaque patient[5].
La présence d'une stimulation profonde cérébrale rend très souvent l'électrocardiogramme du patient ininterprétable du fait des artéfacts électriques et impose l'inhibition transitoire du stimulateur pour pouvoir obtenir un tracé correct.
Coût
La technique reste coûteuse du fait du matériel, de l'implantation et de la surveillance. Par exemple, son coût a été estimé en Allemagne à plus de 20 000 euros la première année (2005). Il est divisé par trois les années suivantes (simple surveillance)[30]. Ceci est à rapprocher du coût moyen annuel des soins (4700 Euros) et du traitement médicamenteux (2800 Euros) estimés selon cette étude). Toutefois cette autre étude estime le traitement médicamenteux annuel dix fois plus onéreux (28200 Euros) et montre une importante réduction du coût chez les patients traités par stimulation cérébrale profonde (17600 Euros).
↑(en) David Dobbs, « Why a ‘Lifesaving’ Depression Treatment Didn’t Pass Clinical Trials ... but could still be a groundbreaking therapy. », The Atlantic, (lire en ligne)
↑(en) Kelly Servick, « Next generation of deep brain stimulation aims to tackle depression », Science, (lire en ligne)
↑(en) Stéphan Chabardès, Mircea Polosan, Paul Krack et Julien Bastin, « Deep Brain Stimulation for Obsessive-Compulsive Disorder: Subthalamic Nucleus Target », World Neurosurgery, vol. 80, nos 3-4, , S31.e1–S31.e8 (DOI10.1016/j.wneu.2012.03.010, lire en ligne, consulté le )
↑(en) Damiaan Denys, Ilse Graat, Roel Mocking et Pelle de Koning, « Efficacy of Deep Brain Stimulation of the Ventral Anterior Limb of the Internal Capsule for Refractory Obsessive-Compulsive Disorder: A Clinical Cohort of 70 Patients », American Journal of Psychiatry, vol. 177, no 3, , p. 265–271 (ISSN0002-953X et 1535-7228, DOI10.1176/appi.ajp.2019.19060656, lire en ligne, consulté le )
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↑(en) Daniel Huys, Sina Kohl, Juan Carlos Baldermann et Lars Timmermann, « Open-label trial of anterior limb of internal capsule–nucleus accumbens deep brain stimulation for obsessive-compulsive disorder: insights gained », Journal of Neurology, Neurosurgery & Psychiatry, vol. 90, no 7, , p. 805–812 (ISSN0022-3050 et 1468-330X, DOI10.1136/jnnp-2018-318996, lire en ligne, consulté le )
↑(en) Zrinzo L, Foltynie T, Limousin P, Hariz MI. « Reducing hemorrhagic complications in functional neurosurgery: a large case series and systematic literature review » J Neurosurg. 2012;116:84-94 PMID21905798
↑ a et b(en-US) David J. Burn et Alexander I. Tröster, « Neuropsychiatric Complications of Medical and Surgical Therapies for Parkinson’s Disease », Journal of Geriatric Psychiatry and Neurology, vol. 17, no 3, , p. 172–180 (ISSN0891-9887 et 1552-5708, DOI10.1177/0891988704267466, lire en ligne, consulté le )